Une fin tragique...

Chapitre I : Une solution toute proche.

Des jours étaient passés depuis cet événement. En quelques secondes, juste le temps d'une attaque, une grande partie de sa vie venait de disparaître. Elle n'osait montrer la douleur qui la tuait peu à peu. Tout ce qu'elle disait, c'était "Merci, ça ira." Tout se disait dans cette phrase, tout se comprenait. Cependant, on la savait forte et toujours debout quoi qu'il arrive. On la pensait forte mais au fond, elle était humaine.

Ses parents étaient donc morts. Elle imaginait ces cadavres au sol, recouvert de leur sang, inertes, froids, morts... Et sa soeur, où était-elle? Vivait-elle encore? Elle s'imaginait que non, retrouver tout ce sang dans cette chambre, elle n'aurait pu survivre, elle était encore si jeune et sans défense. Elle qui lui avait promis de la protéger quitte à en perdre sa vie... Elle n'avait su tenir sa promesse. Qui lui restait-il alors? Qui était encore en vie et proche d'elle?

Elle marchait, longuement, pour rejoindre un autre camp d'attaque. Elle n'était pas seule, elle avait rejoint les Visae Spiriti. Malgré la guerre, tous rirent, chantèrent, dansèrent en route oubliant leur peur de mourir suite à cette bataille. Pour eux, c'était bien le meilleur moyen de rester bons vivants, le rire. Elle les suivait, sans rien dire, la tête das les nuages. Puis une image lui vint à l'esprit.

Chouchoutte... Il lui restait Chouchoutte. Cette magnifique aquamancienne pour qui elle donnerait sa vie juste pour un simple sourire de sa part. Elle vivait encore elle, pourquoi ne pas se raccrocher à elle alors? Son image ne quitta pas ses pensées. Son coeur battait, elle le sentait. Sa voix, sa douceur, sa tendresse, son amour... Tout ce dont elle aimait en elle resurgissait, l'apaisant de cette souffrance. "Ô ma belle et tendre épouse ! Que ferais-je si vous n'étiez plus là vous aussi... "

Puis l'image disparut et la douleur refit surface. Elle continuait sa route sans voir ses amis autour d'elle. Son regard accrochait le sol, elle retenait les larmes pour ne pas montrer sa souffrance. Elle sortit ses griffes sans que les autres ne s'en aperçoivent et commença à entailler ses bras profondément. Elle ressentait la douleur, ça lui faisait tant de bien. Cette douleur par laquelle tous les maux ressortaient, par laquelle elle pouvait laisser partir sa souffrance quelques minutes. Juste quelques minutes de répis.

Le sang coulait mais si peu. En effet, ses blessures se refermèrent aussi tôt. "Sale bête..." Elle rangea ses jolies griffes et attrapa l'une des gourdes qu'elle portait. Elle ne savait pas ce qu'il y avait dedans, un alcool fort souvent utilisé pour les blessés lorsqu'ils sont soignés. Sans se méfier, elle but ce liquide d'un coup sec. Le liquide pénétra et se mélangea à son sang. Son corps la brûlait, elle aimait. Elle aimait tant cette douleur qui lui faisait du bien. "Soignons le mal par le mal..."

La route se faisait longue, beaucoup trop longue. De nombreuses gourdes et fioles venaient d'être vidées mais la jeune druidesse avait toujours les idées aussi claires. La souffrance logeait donc encore dans son corps. Comment oublier ces pertes? Comment oublier cette vie? Comment oublier tout simplement ! Elle s'avança et cessa d'être à l'écart du groupe. Elle respira un bon coup et entra dans leur danse.

Elle se mit alors à rire, à chanter, à plaisanter, à évacuer tout ce qu'elle avait en elle. Oubliant cette femme, cette soeur, ce massacre, cette vie, cette douleur... Le chemin n'était plus très long, elle en profita alors pour rire un maximum avant de savourer une nouvelle perte qui, cette fois, mettrait fin à tous ces sentiments si fatiguant...

Le chemin se finissait et le sérieux revenait immédiatement. Toute la bande perdit son rire sachant ce qu'ils les attendaient au bout de cette impasse. Arrivés sur les lieux, un chef de guerre les guida. Proposant aux guerriers de se préparer pour l'assaut. Tous écoutèrent attentivement pendant que la jeune femme disparaissait dans les rangs. Nul n'avait remarqué sa non présence, tous étant concentrés dans le plan.

Au moment d'attaquer, certains purent remarquer que les armes de la jeune druidesse était encore sur les bagages. Celle-ci serait partie désarmée vers la bataille? Nul ne doutait, tous savaient que celle-ci ne prendrait pas le risque de se tuer. Tous connaissaient cette grande combattante malgré sa féminité et son jeune âge. Mais lors de ce triste jour, nul n'avait remarqué que cette jeune femme était déjà arrivée en plein milieu de ce champ de bataille, désarmée, n'attendant que l'ennemi...

Chapitre II : Une mort imminente?

L'attaque commença enfin et les combattants soutenant Zelandra se ruèrent tous sur l'ennemi. A cet instant, plus rien ni personne ne comptait à part notre survie face à cet affront. Les visages de nos alliés étaient alors inconnus ne voyant qu'un combattant portant le même blason et les ennemis en face ayant ce blason différent. C'est ainsi que personne ne reconnut et ne s'aperçut de la présence de la jeune femme en plein milieu du champ de bataille.

La jeune druidesse avait pris le soin de partir peu de temps seulement avant la première ligne d'attaquants. Ainsi personne n'avait pu remarquer que celle-ci était déjà là avant les autres. La première ligne de guerriers derrière elle la rattrapa donc aussi tôt. Les ennemis en face arrivèrent presque en même temps. Aussitôt arrivés, les combattants frappèrent le premier ennemi venu entendant ainsi les épées grincer de leur métal.

Elle ne bougeait pas, les bras le long de son corps, le regard au loin et dans le vide, l'air triste... Un ennemi arrivé vers sa direction, le glaive en avant, prêt à la frapper. Celle-ci n'avait aucune réactions, elle ne regardait même pas le guerrier, son regard restait fixé au loin comme si rien ni personne ne l'entourait. Son corps ne réagissait pas mais que se passait-il dans son esprit? A quoi pouvait-elle penser pour ne pas réagir ainsi face à un ennemi auquel elle ne ferait qu'une bouchée?

La jeune druidesse, encore figée, revoyait malgré elle certaines scènes importantes de sa vie. Ainsi elle vit défiler sa montée en gloire en tant qu'archère, cette renaissance avec une bête inattendue en elle, cette soeur qu'elle surveillait, ce loup qui souvent la taquinait et cette femme dont les longs baisers l'aidaient à vivre encore et encore. Tous ces doux moments qu'elle pourrait vivre encore et pourtant non, elle était là, n'attendant que ce glaive lui transpercer la chair...

L'ennemi approchait et n'était plus qu'à quelques centimètres d'elle. A cet instant, elle se réveilla et fonça vers lui. Allait-elle l'attaquer? Sa course fut arrêtée nette. Elle avait fait son choix, cet obstacle venait de la stopper. Elle sourit. Un sourire qu'elle n'avait jamais eu auparavant. Elle avait les yeux plein d'espoir et un sourire qui n'en finissait pas. Elle était si heureuse enfin. Puis son sourire se transforma. Non pas qu'elle n'était plus heureuse mais un léger filet de liquide rouge sortait du coin de ses lèvres. Son sang coulait enfin...

L'ennemi en face était déjà reparti avec son glaive souillé du sang de la jeune femme. Il l'avait oté d'un coup sec qui la fit réagir. Son point d'attaque avait été si parfait, en plein coeur. Sa longue cape qui était d'un blanc aussi pur qu'elle commença à virer au rouge, son corps se vidait de ce sang si précieux. Son sourire, quant à lui, restait intact et son regard était toujours fixé au loin. Puis elle tomba, soupirant quelques mots. "Prend soin de toi...Mais ne m'oublie pas..."

Elle était là, allongée dans une marre de sang, son propre sang. Le regard élevé vers le ciel comme le rejoignant, le sourire qui montrait sa liberté et ses dernières paroles pour Chouchoutte, elle laissa la mort l'emporter sans que cette fois-ci la bête ne la protège. Elle espérait tant une fin, cette fin que nul n'aurait pu l'en empêcher. Elle devait accomplir cet acte qui enfin l'emmènerait vers le Paradis...

La guerre, quant à elle, continuait et de nombreux hommes tombèrent tout comme elle. Mais parmi ces hommes, aucun n'avait le sourire que la jeune femme possédait. Aucun n'avait souhaité mourir. Aucun n'avait osé partir à la guerre laissant ses armes au camp. Alors pourquoi elle? Pourquoi cette Folie avait-elle pris tant d'ampleur dans son esprit? Pourquoi avait-elle laissé son corps en plein milieu, prête à en finir?

Tant de questions qui resteront sans réponses. La jeune femme avait décidé que ce jour serait le dernier et sa volonté aura été plus forte que tout encore une fois. Des heures passèrent, la nuit tombait peu à peu. Certains guerriers hurlaient, sentant leur mort arriver quant à d'autres, ils respiraient à peine, mourant déjà. La guerre touchait à sa fin. Une fin atroce où de nombreux hommes périrent. Une fin aussi atroce que celle de la jeune femme...

Chapitre III : Ou le début d'une autre vie...

Tous ces hommes qui gémissaient encore au coucher du soleil étaient désormais morts de leurs blessures. Tous ces hommes venaient de périr sans le vouloir, tout cela pour défendre un blason qu'ils croient meilleur que celui d'en face. Aucun n'avait souhaité la mort à part celle de son ennemi. Elle, elle n'aura souhaité que la sienne et elle l'aura obtenue. Comme souvent, elle avait ce qu'elle voulait.

Le terrain était désormais désert, désert de corps qui pourraient encore contenir la vie. Cette vue était immonde cependant les vautours arrivaient déjà autour des corps, commençant à les entamer, commençant à les déchiqueter. Ceux-ci étaient à leur goût, la chair encore fraîche et sentant tout juste la mort. Mais leur repas fut stoppé, tous s'envolèrent. La brume commença à s'étendre sur le champ de guerre, les rayons du soleil arrivèrent avec une grande lenteur en ce jour de deuil.

Qu'avait-il pu avoir pour que ces rapaces s'envolent? Il y aurait-il encore des survivants dans les parages? Pourtant, le lieu était désert et le vent soufflait à peine, ce qui n'aidait pas à voir les horizons brumeux. Ce brouillard d'une épaisseur rare empêchait la visibilité autour de ce champ et pourtant... Pourtant, on pouvait remarquer au loin cinq ombres bien distinctes avancer sur le coeur de ce massacre.

Ces cinq ombres se ressemblaient étrangement. On pouvait identifier des hommes portant un habit distingué. Vêtus d'un costume qui semblait religieux par la forme de leur toge, on put remarquer, une fois plus près, que ceux-ci n'en étaient pas. Etaient-ce alors des ennemis qui venaient piller les dépouilles? Ou bien des hommes venus prier pour tous ces morts? Qui que ce soit, ils savaient où ils allaient.

Leurs pas semblaient ralentir peu à peu comme cherchant leur direction. Attendant une instruction, un rayon de soleil étrange et semblant venir de nul part transperça la brume et entoura le corps de la jeune femme. Malgré l'intensité de cette lueur, le corps de celle-ci était toujours inerte et froid par la mort.

Cette lueur, aussi puissante soit-elle, éclairait la jeune femme au sol ainsi que le chemin la reliant aux cinq hommes. On put voir alors que ceux-ci n'appartenaient à aucun des alignements connus. Seule chose qu'on pouvait distinguer, en plus de leur habit, était leur prière. Leurs voix résonnaient en ces lieux vides.

Dominum sui esse... Dominum sui esse... Alea jacta est... Dominum sui esse... Dominum sui esse... Ibi deficit orbis...

Ils s'approchèrent de plus en plus et entourèrent la jeune druidesse. Que voulaient-ils ? Leur ton était de plus en plus fort, plus certain, plus envoûtant comme si une chose les attendait. Serait-ce un rite ? Seraient-ils aux ordres de quelqu'un ? Qui pourrait vouloir de la dépouille d'une misérable druidesse qui aura été lâche une fois dans sa vie en se donnant la mort.

Leur prière cessa d'un coup et d'une mobilité parfaite, ils bougèrent en rythme pour soulever ce corps dépourvu de toute âme comme ayant reçu un ordre. Sous la forme d'une croix, la jeune femme fut soulevée et transportée. Les cinq hommes firent leur chemin à l'envers, murmurant la musique de leur chant accompagné du corps de la jeune femme...